Les étudiants rentrent dans la salle…
Chacun avise un chevalet, pose ses affaires à côté, ajuste son carton à dessin devant lui avec une feuille de papier (souvent du « Ingres vergé 90g »)…
Tout en discutant, on commence à tailler ses crayons, sanguines, fusains, mines de plomb, on sort ses gommes (les blanches et les « mie de pain »), des chiffons, un fil à plomb… et l’on attend le modèle…

dessin classique
Le modèle, généralement une fille prend ses marques (nue ou habillée) sur une petite estrade au milieu de la salle… Arrive le professeur un gobelet de café à la main… « Bonjour, tout le monde ». Puis il donne la durée de la pose : 5 minutes, 10 minutes, 2 x 15 minutes, etc…(surtout dans les premières séances de l’année, après c’est toujours pareil)

C’est le départ, tous les étudiants se mettent à dessiner sans tarder, machinalement et sans réfléchir…

Le prof fait des commentaires du style :

  • Rien n’est juste prenez vos mesures !
  • Et ton fil à plomb, tu es encore venu sans fil à plomb ? (Le fil à plomb aide à apprécier les verticales.)
  • Un peu de sensibilité, que diable, c’est trop demandé ?
  • Ne charbonne pas autant !
  • Ca manque de sensibilité, tout ça !
  • C’est bien timide, il faut oser, osez, etc.
  • Trop raide, trop mou, etc.

dessin classique
Difficile de comprendre précisément ces remarques, non ?
Vous le devinez peut-être, nous trouvons que dans les cours de ce type, il y a un gros problème… Avec de telles remarques, on a l’impression que le dessin est quelque chose d’universel, qu’il n’y a qu’une manière de dessiner…
Je regarde le modèle et je dessine, mais en réalité je fais quoi ? Un croquis ? Une œuvre d’art ? Je dessine, mais pourquoi ? Ai-je un but, quel but ?

Il faudra un temps incroyable à ces étudiants pour comprendre à travers les remarques pseudo-artistico-classico-académico-machin-choses de ce prof, ce qu’il attend d’eux. Et au bout du compte, les étudiants n’auront vraiment pas appris grand chose… Tout au plus, pour les meilleurs d’entre eux, quelques notions d’anatomie, de proportions et de lumières…

Lorsqu’on dessine, il est beaucoup plus formateur de se fixer un objectif très précis.
Par exemple: « j’ai besoin (pour la petite scène que j’ai en tête), de dessiner une fille avec de longs cheveux et qui allume une cigarette… Je demande donc à ma cousine Isabelle qui a LES CHEVEUX LONGS et à ma sœur Gertrude QUI FUME DES CIGARETTES, de poser chacune pour moi une petite heure. Je ne m’intéresse qu’aux seuls problèmes de la représentation des cheveux pour ma cousine et de la gestuelle pour ma sœur…

Résultat : Vous serez beaucoup plus concentrés, vous saurez aller à l’essentiel, vous apprendrez à observer, à regarder, vous apprendrez vraiment à dessiner quelque chose… Et si vous demandez des conseils, des avis de profs, ils seront à même de vous faire des critiques parfaitement adaptées à vos intentions de dessinateur. Vos croquis seront UTILES, ils seront FORMATEURS… et cerise sur le gâteau, ils seront BEAUX !

Même le grand Léonard de Vinci ne faisait pas « du beau dessin » juste pour faire du beau dessin, il se fixait des objectifs précis, et ses croquis sont admirables…

 

Conseil réalisé par Joseph Béhé,
Pour l’iconograf.com